samedi 4 octobre 2025

Photo brodée

De l’errance au bout du monde

C’est une des premières photographies que Jean-Marc a faite après avoir repris la pratique de la photographie argentique... C'est donc sur cette photo argentique que je fais mes premiers test de broderie... 

"La fin de mes activités professionnelles s’annonçait, la « Jubilacion » comme disent les espagnols, une sorte d’allégresse allait peut-être arriver, j’allais en tout cas avoir un peu plus de temps pour me replonger dans la photographie. J’avais installé ma chambre noire, récupéré du matériel avec Angélique, agrandisseurs, cuves, papiers photographiques et bien d’autres trésors, il avait fallu nos deux voitures pour assurer le déménagement et j’ai ressorti enfin mes appareils et mes objectifs.
J’avais chargé une cartouche de pellicule, une ancienne bobine qui était sans doute restée trop longtemps dans un chargeur, un peu collée, sûrement un peu rayée, oubliée pendant plusieurs années jusqu’à ce qu’elle perde en sensibilité…
Comment photographier l’errance ? Un sujet qui continuait de résonner en moi après la lecture de l’essai éponyme de Raymond Depardon.
L’errance n’est pas un projet de voyage, une destination attendue, un point final qui s’arrêterait au détour d’un chemin. Non, c’est plutôt un commencement, une continuité, une quête perpétuelle. Des bouts de chemins d’errance comme j’aime le dire, un élan qui vous tire hors d’une routine, hors du commun. Ces chemins du bout du monde sont pour moi indissociables de la marche comme ils sont indissociables de la création photographique non seulement parce que la marche nous plonge dans un état où tous nos sens en alerte réveillent notre créativité, mais parce qu’il y a en moi sans que je n’arrive à l’expliquer, un lien naturel entre les chimies photographiques utilisées dans les premiers procédés du début du dix-neuvième siècle et le contact avec la terre, les sols ferreux, les sels d’argent et d’or, souvenirs de mes explorations de jeunesse passionné alors de minéralogie et de spéléologie.
 La randonnée m’a toujours servi de refuge pour me retrouver, pour me sentir tout simplement « vivant », à l’écoute de mon corps en lien avec la nature. Un émerveillement, une errance poétique que j’ai commencée maintenant depuis plus de quatre ans pour me guérir, me dépasser sans chercher à réaliser une quelconque performance mais plus simplement pour tester mes limites et trouver la force de continuer les chemins de la vie. J’aime la marche dans des espaces naturels, sauvages, où la disponibilité à l’inattendu serait le seul guide et je me laisse surprendre par l’émerveillement. C’est une disposition à l’accueil de la vie telle qu’elle se présente, l’allégresse de se sentir vivant. 
Mais revenons à cette photographie, une route qui traverse un pont et qui semble disparaître, une silhouette à peine visible qui s’efface elle-même dans l’amorce du virage. Je trouve ici un beau commencement pour représenter l’errance, il y a toujours un début et il faut parfois accepter de se perdre je ne dis pas, disparaitre, mais plutôt s’effacer un moment dans un instant photographique et pourtant figé sur l’image, c’est ici la magie de la photographie. J’avais mis l’appareil sur un pied, cadré l’image et j’ai continué la route sur le pont de Quézac en Lozère. C’est Angélique qui a déclenché.
De cette première image est né un projet photographique dont le fil conducteur pourrait-être un travail sur l’instant avant l’effacement, la disparition du sujet, une mise en scène conduite à deux sur nos chemins de découverte du bout du monde, de nos bouts du monde. Le projet artistique naît petit à petit en explorant plusieurs procédés d’effacement du sujet dans l’image en essayant de donner la sensation de la continuité du récit hors champ, le sujet poursuit un chemin que le spectateur ne peut percevoir que par son imagination, pure liberté de l’errance poétique. Cette émotion est renforcée par une intervention directe sur l’image, sur la matière chimique par une altération de la gélatine, pellicule altérée, ou altération au moment de son développement ou en utilisant des techniques de tirage plus artisanales avec la réalisation de papiers alternatifs, cyanotypes, Van-Dick. D’autres procédés sont à expérimenter, à découvrir aussi, Angélique cherche à broder certaines parties de l’image, travail sur la matière, la couleur, une matière de fils composés qui est rajoutée ici.
De ce premier essai surgit aussi l’envie de photographier des bouts du mondes, de prendre des sujets qui exprimeraient aussi cette émotion de bouts du monde…
Tout le monde a un bout du monde dans sa tête, un petit îlot en suspension bien cacher dans les replis de sa cervelle mais qui vous appelle. Je ne sais pas vraiment ce que c’est, je le devine comme un refuge accueillant, apaisant, non une destination finale mais plutôt une succession de petites haltes ; pour y rester une minute, plusieurs heures ou des journées entières suivant nos états d’âme, juste le temps de se ressourcer avant de repartir et de continuer le chemin. J’aime à penser qu’il y a une succession de ces bouts du monde à découvrir et qu’ils nous font du bien dans le corps et dans l’âme, des lieux réels proches ou éloignés, déjà connus ou inconnus de nous et qui se révèlent être des bouts du monde parce que d’un seul coup, nos connections neuronales nous les font apparaître différemment par la magie de la lumière qui impressionne notre rétine, nous raconte une histoire, notre histoire, caresse notre mémoire et libère nos émotions.
Et avec l’envie d’explorer aussi d’autres sujets, là où la terre semble s’arrêter, s’effacer par l’effet de l’érosion, laissant des squelettes de pierres, des architectures de couches sédimentaires formant des lignes, des dessins, une esthétique de déserts, de tempêtes, des chaos granitiques, mais aussi des végétations recouvrant les fractures des canoles, des chemins noyés d’ombres et de lumières qui se perdent dans la forêt. Mais aussi des constructions humaines, des architectures qui pourraient surgir de mon imaginaire mais bien réelles pourtant, ces abbayes perdues sur des sommets inaccessibles, ces châteaux, ces forts, résistants et semblants se dresser dans les tempêtes.
Ce projet, nous allons le mener à deux, pour croiser nos regards, nos sensibilités en faisant le pari que si nous jouons ensemble, nos photographies dirons quelque chose de nos bouts du monde, des croisements, des complicités, des correspondances dans un dialogue à deux pour révéler nos « expériences » de bouts du monde."

Premier pas, premier essai pour enrichir le projet bout du monde

C’est une des premières photographies que Jean-Marc a faite après avoir repris la pratique de la photographie argentique... C'est donc sur cette photo argentique que je fais mes premiers test de broderie... 

Cette photo a été prise sur le petit pont en pierre de Quézac lorsque on faisais les aller-retours à Mende pour soutenir le père dans son combat contre le cancer. Une petite pause sur la route pour faire des essais photos et se préparer à la journée! 

test photo brodée

Je ne suis pas totalement satisfaite par le résultat. J'avais vu sur internet une personne qui faisait ces pré trous au découvite, je trouve qu'ils sont du coup trop présent ... je testerai autrement pour les futurs projets! j'ai également pris du fil un peu ton sur ton et finalement cela ne ressort pas assez visuellement ... pour les prochains tests je mettrai des couleurs proches de la réalité... cependant dans mes souvenirs ce pont est en pierre grise alors je suis proche de la réalité!

A suivre pour des conseils plus précis lorsque mes essais seront plus satisfaisant. 

Il me faut garder à l'idée qu'il convient de bien choisir le fil rouge du projet pour mettre en avant la partie brodée sur la photographie. 

Angie